Le Marcelou Extrait de : « Fant de Loup. » |
Mon pépé est né à mi chemin de l’automne, en l’an 1891, dans l’ancienne maison du gabelou. (autrement dit du percepteur de gabelle).
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la mairie de Saint-Pardoux |
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A neuf ans, mon pépé a été loué à la ferme de Gauthier. |
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Quand j’étais trop malheureux, je grimpais sur un arbre pour apercevoir, au loin, le toit de ma maison. Je l’imaginais, bien plus que je ne le voyais … mais c’était toujours ça. Et la je pensais aux miens... et je me mettais à pleurer. Comme j’étais bien caché, dans mon arbre, personne ne me voyait … qu’on se serait foutu de moi.
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Doucement Léonard retire ses sabots et les frotte vivement l’un contre l’autre. Le bruit des clous, d’ordinaire fait fuir les loups. Mais ce loup semble d’une autre trempe .Il ne bouge pas. L’homme et la bête se font face. Surtout ne pas bouger …c’est à celui qui impressionnera l’autre. Léonard continue à cogner ses sabots. Le loup ne recule pas. Alors saisi d’une colère soudaine, le pépé sort son couteau de la poche et se met à crier. A nous deux loup ! Ou ta peau ou la mienne ! Quelques secondes de totale immobilité. Léonard, d’un geste brusque fait jaillir la lame. Les yeux du loup n’ont pas dévié d’un pouce. On continue à s’observer. Et puis, comme à regret, lentement l’animal amorce un quart de tour et disparaît dans le noir.
Ce pépé n’avait pas suivi les instructions qui consistent à ne jamais se retourner, pour la raison bien particulière qu’il avait à faire à un loup peu ordinaire, et lui-même était un homme d’un courage exceptionnel ! Par la suite on s’est demandé si le fameux loup semait la terreur de Cadouin au Bos de Bourret, en passant par Peyrelevade, la Brunie, Regagnac, le Naud de la Peyre et pour finir, à la borie d’Allas, autrement dit « Biel Loup » ne venait pas en droite ligne du loup des bois de Peyrelongue et de Laroque. |
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Vous vous souvenez de notre pépé qui pour avoir fait trois ans de service, quatre ans de tranchées, un an en Crête, sans que ça l’ait tué, estimait bien valoir à lui tout seul, quelques dix loups et peut être bien cinq à six renards. Avec de pareils ancêtres, les loups ne devaient pas dormir tranquilles, nous n’avions rien à craindre, assurait notre grand-père. Peut-être que si la mémé Adrienne avait fait les tranchées, le service et la Crète, elle aurait valu dix loups et six renards, et elle ne serait pas morte. Les yeux bleus de notre pépé regardent vers le ciel, haut, bien haut. Il doit penser qu’on a raison. Notre mémé est morte à vingt huit ans. Laissant notre mère, la Nizou et notre pépé avec cette mémé Philippine, qui savait bien faire la soupe, et lire le journal. Mais qui ne riait plus jamais. Le 11 novembre 1918 la guerre lui avait pris son fils, Philémon. Quelques mois avant, elle avait perdu son mari, qui était aussi son cousin germain et sept ans après sa fille mourait de la tuberculose que Philémon avait ramenée des tranchées. Voir une page spéciale Philémon. |
Et maintenant pépé, que la mémé Philippine n’est plus là pour te faire la soupe, tu vas te remarier ? C ‘est pas la peine, quand tu seras vieux la Lili et moi, on te fera la soupe. Et on te lira le journal, puisque la vie t’a pas laissé le temps d’apprendre à lire et à écrire, et que c’est pas grave puisque tu as tout le reste.Jean - Louis Filet / Copyrignt © filet.org 2002 / 03/10/2007