banniere

Le site des familles Filet et apparentées;  Association "La Gens Filet"

index     marcelou     le petit     Joseph     patois

Le Petit

Extrait de : « Fant de Loup. »
Avec l’aimable autorisation de Liliane Lucet-Ponzio.


Le maire de Bouillac, a été confronté à une situation à laquelle il n'était pas préparé. Voilà que s'amène un beau matin, le Germain des Tertres
  • - Il te faut marquer que la Bertille vient d'avoir un petit.
  • - Il est né quand? Demande le maire.
  • - Cette nuit pardi.
  • - Comment il s'appelle?
  • - Je te le sais moi!
  • - Bon, eh bien trouve-lui un prénom, et qu'on l'inscrive.
  • - Fais comme tu veux J'ai pas d'idée...
  • - Et d'abord ce petit, c'est un garçon ou une fille?
  • - Ah ça mon pauvre je peux pas te dire, j'ai pas pris le temps de regarder! C'est un petit
  • - Mais bestiat, il est à toi ce petit! C'est ni un âne, ni un veau! Tu pourrais peut-être savoir!
  • - Au bout de huit, ça m'intéresse pas plus que ça. Tu n'as qu'à marquer que c'est un petit, et je reviendrai un autre jour, que j'aurai un peu de temps, pour te dire le reste.
  • - Retourne chez toi bougre d'âne, et reviens-moi bien vite avec des renseignements qui tiennent d'aplomb, et jusque-là, ne compte pas que je marque quoique ce soit sur le registre!

 
 

Le soir Germain se remit en chemin et arriva chez le maire à la nuit noire.
- Tu marques Jules et je te précise que c'est un garçon.
Le maire, qui était à table, secoua plusieurs fois la tête en riant.
- Avec un prénom de ce calibre je m'en serais un peu douté, bien qu'avec toi, il faut s'attendre à tout!

Contrairement à ce que l'on pourrait penser, Germain n'était pas simple d'esprit, mais tant d'événements le dépassaient
- Je vais me trébler, répétait-il .Autrement dit, perdre la tête. Et il y avait de quoi.
A commencer par l'Antoine, onze ans, qui poussait mal. La cause en était a ses poumons, qui ne pouvaient pas prendre leur suffisance d'air.
Ce qui le faisait souffler comme un buffadou*percé, et l'empêchait de galoper les moutons ou les vaches, quand ces carnes filaient vers le trèfle ou les raves. Pour le reste, il faisait l'affaire. A condition de ne pas le presser et encore moins de le contrarier. En fait l'Antoine, un rien l'étouffait
Sylvestre, dix ans. On aurait rien eu à en dire, s'il était tombé chez des riches. Parce qu'il était envieux de tout, et dépité à s'en rendre malade.
Jean,huit ans, souffrait du mal de terre, appelé également épilepsie. Il était mal né.La responsabilité incombait à Firmin, son jumeau, qui venu le premier,sans se presser, avait trop fait attendre son frère.
Et puis la Mélanie, roussette et dégourdie comme un furet, mais toujours à se sauver, que plus d'une fois on l'avait cru perdue. Rien n'y faisait, il fallait qu'elle galope. Et quand elle partait, ne savait rien faire d'autre que marcher, droit devant elle.
Dans ce cas comment vouliez-vous qu'elle retrouve sa maison?
- Le loup finira par l'attraper!
Ça, elle le savait. Et la peur la faisait aller de plus en plus vite, et donc, de plus en plus loin de son point de départ. Comme on ne pouvait pas compter sur l'Antoine qui manquait d'air, pour lui courir après, encore moins sur Sylvestre, dont le rêve était d'être fils unique, et qui ne craignait donc pas de perdre un des siens, c'était ce pauvre Germain qui partait à la recherche de sa Mélie.
  Et quand il lui demandait:

- Mélie , pourquoi tu te sauves?
- Je me sauve pas! Répondait-elle... même que j'ai eu bien peur...
- Mais alors, pourquoi tu quittes la maison?

Elle regardait ce pauvre papa qui transpirait à grosses gouttes et disait d'une petite voix ferme:

-Il faut bien que je marche.

Après venait Jeanne, toute menue et claire comme un épis de blé, que même les sourcils ne marquaient pas.
Aimé passait son temps, soit à téter, soit à pleurer. Autant dire qu'il était sans grand intérêt.

Et là-dessus, arrive ce Jules, dont on se serait bien passé. Bien ou mal venu, il se posa là.
Ce qui ne fit pas le bonheur de tous, à commencer par Pierre le loubatié..
A cause de cette Victorine, qui s'y entendait pour faire tourner les gens en bourrique...
Mais c'est une autre histoire...

retour Jean - Louis  Filet  / Copyrignt © filet.org 2002 /  03/10/2007